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Mal de vivre

«La vie, ce n'est pas avoir et obtenir, mais être et devenir», déclamait l’actrice américaine Myrna Loy.

 

Le vingt-et-unième siècle en est un d’abondance. Les gens croulent sous une multitude de biens mais ne semblent pas plus heureux pour autant. Nous n’avons jamais autant possédé. Pourquoi ressentons-nous alors une telle sensation de manque ?

En fait, nous avons tout et, néanmoins, nous n’avons rien. Nous restons obsédés par le désir de ce que nous n’avons pas. Cette soif inextinguible de posséder l’objet du moment, le moment présent, cette émotion instantanée semble essentielle et pourtant…L’être aimé, l’objet qu’il nous fallait hier, nous semblent brusquement dénués d’importance. Notre génération est avide de présent. Plus de place pour ce qu’on a construit, nous voulons tout maintenant. Nous avons oublié le plaisir d’espérer, celui d’attendre. Y aura- t- il une place demain pour ce que nous avons aimé hier? Ou alors, sommes-nous en train de fuir ? Mais que fuyons-nous au fait?

La routine, sans doute, le besoin inexpressible de changer quelque chose dans notre vie. 

 

«Je suis convaincue qu’une grande partie des maladies résultent d’émotions réprimées.», disait Linda, l’héroïne du roman «Adultère» de Paolo Coelho.

 

Est-ce vrai? Quelle part a sur notre moral, voire sur notre santé, le fait d’avoir gravi le sommet de la pyramide? De n’avoir aucun but ultime, aucune raison de nous battre. Nous avons créé un monde où le désir de nouveauté rivalise avec le besoin de faire taire une faim d’émotions. Quand il ne la comble pas, ne serait-ce que pour un instant.

Cette quête perpétuelle commence de plus en plus tôt. Nos enfants se lassent rapidement du jouet tellement réclamé, les objets se succèdent dans nos foyers, les couples se font et se défont. Le nœud familial ne constitue souvent plus une ancre à laquelle se rattacher. Alors, pour ne pas rompre ce lien, nous nous créons de nouveaux besoins, un nouvel objet à acquérir, de nouvelles voies à emprunter. Quand nous ne devenons pas esclaves des petites pilules du bonheur. L’enfer est-il au bout du chemin ou bien le vivons-nous chaque jour, à chaque pas? Comment retrouver ce goût de vivre, ce goût de lutter pour de vraies causes? Nous avons créé une société où l’avoir prime sur l’être. Ne compte que celui qui possède le nec le plus ultra de la technologie moderne, le téléphone le plus en vogue, l’automobile la plus performante, une nouvelle maison, un nouvel amour. L’ancien a perdu toute importance et n’existe plus. Nous avons besoin d’avoirs pour être. Nous revendiquons notre droit au bonheur. Mais savons-nous le reconnaître ? Notre soif de biens commence alors. Nous nous lançons dans une quête effrénée du bonheur. Plaisir de manger, plaisir de boire, plaisir de posséder. 

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Et si cette quête ne servait qu’à masquer notre peur d’être seul au monde?

«  On danse les uns avec les autres [ …]

[ …]Mais au bout du compte, on se rend compte qu’on est toujours tout seul au monde », chantait Luce  Dufault dans la comédie musicale Starmania.

 

La peur d’être seul au milieu de cette immensité a quelque chose de déstabilisant. Nous ne sommes qu’un point au regard de l’univers et nous aspirons à l’éternité. Notre passage ne dure qu’un instant mais il a changé le visage de la planète et avec lui nos besoins. L’heure est à la reconquête de notre vie. Il faut redéfinir les défis de demain. Apprendre à redessiner les lignes de notre parcours et savoir s’approprier notre bonheur au quotidien. Pouvoir redevenir les acteurs de notre destinée. Car combler ce vide que nous ressentons ne peut se faire qu’à ce prix. C’est ainsi que nous laisserons aux générations qui nous suivront l’espoir et le goût du lendemain.

 

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